Au début de la vie nous naissons tous dépendant et vulnérable pour répondre à nos besoins fondamentaux. Plus tard dans la vie d’adulte nous sommes à nouveau confrontés à cette dépendance pour nous réaliser : dans une relation intime, dans notre vie sociale et professionnelle… La dépendance n’est donc pas une anomalie ni un problème en soit dans le développement de la personne. La dépendance ne devient un problème que lorsqu’elle est mal gérée c'est-à-dire que l’on calque toujours notre comportement en fonction de cette dépendance, à travers une relation mais aussi une activité ou toute autre sorte d’objet….
Les relations que nous avons avec notre environnement au début de notre vie vont déterminer l’évolution de cette dépendance. L’environnement relationnel va déterminer les caractéristiques que va prendre notre dépendance dans notre évolution.
Les parents ou les personnes qui s’occupent du bébé ont un grand pouvoir sur celui-ci. Si ce pouvoir n’est pas suffisamment ajusté aux besoins du bébé, il y a alors un équilibre relationnel disharmonieux qui s’installe. C’est le cas lorsque les parents agissent trop souvent en abusant de leur pouvoir sans faire attention aux besoins de l’enfant. L’enfant introjecte alors souvent des émotions fortes et négatives comme la honte, la culpabilité, l’humiliation…mais aussi des peurs liées à l’abandon, au rejet….
Le bébé ou le jeune enfant n’a alors pas d’autres choix que de s’adapter aux comportements de son environnement pour survivre.
Affectivement, la jeune personne ne peut pas accéder à ce qui est nécessaire pour son évolution psychoaffectif, elle ressent alors une grande souffrance. Pour s’en protéger elle commence à se renier, ce qui amène une négation de sa personne.
Dans une situation trop déséquilibrée, elle introjecte alors une mauvaise image d’elle et pense que ses besoins et comportements sont mauvais ou inadaptés. Se renier revient petit à petit à éviter d’exprimer ses besoins, les réfréner pour finir par s’en détacher et ne plus les reconnaitre. Elle a alors peur de ressentir ce qu’elle ressent et ce dont elle a besoin, elle s’en détache de plus en plus.
De ce fait pour survivre la personne devenue dépendante affectivement adopte alors un comportement calqué sur son environnement. Elle centre son attention sur le comportement de ses parents ou de ceux qui s’occupent d'elle. Elle adopte un comportement pour répondre aux attentes qu’elle imagine que les autres attendent d’elle pour être aimée. Elle perd alors le contact avec sa propre vie affective et adapte celle-ci à son environnement. Elle bloque ainsi son propre développement affectif.
La personne finit par penser que son bien-être dépend de l’autre. Elle verrouille ainsi sa manière de se comporter en se coupant d'elle-même. La relation a elle-même devient alors déficiente.
Le mécanisme de la dépendance affective se met alors en place et il sera très difficile pour elle de s’en détacher. Elle reproduit alors sans arrêt cette manière de se comporter avec soi et les autres.
Les caractéristiques de la personne dépendante :
La recherche constante d’amour de la part de la personne dépendante affectivement et la mauvaise estime de soi sont ce qui la caractérisent le plus.
La personne ne s’aime pas et elle a une mauvaise estime de soi. L’image de soi dépend des autres et de son environnement.
Elle se voit et se juge à travers le regard des autres. Elle ne supporte pas d’être seule, de ce fait, elle a tendance à accepter n’importe quel type de relation pour ne pas l’être. Cela a pour conséquence de choisir souvent des partenaires inadéquates qui ne répondent pas à ses besoins profonds. Elle a de grandes difficultés à vivre une relation intime harmonieuse et heureuse. Soit elle vit le plus souvent des ruptures à répétition, soit elle s’accroche à n’importe quelles relations même si elles sont toxiques pour elle. On pourrait même dire surtout parce qu’elles sont toxiques pour elle car la personne en situation de dépendance y trouvent une qualité de relation habituelle pour elle où elle y trouve de la mésestime d’elle-même, c’est bien là le problème…Ce n’est pas systématique mais avant de s’en rendre compte, ce schéma relationnel répétitif est le plus courant.
Elle cherche à combler ses besoins auprès d’autrui mais aussi a travers des objets et représentations externes comme le travail, la position sociale, les biens matériels….
Cette recherche extérieure n’est pas satisfaisante car elle ne répond pas à ses besoins d’être soi-même, d’avoir une bonne estime de soi, de la confiance en soi, de développer son autonomie…
De ce fait elle ressent le plus souvent un état d’insatisfaction permanente sans forcement savoir exactement qu’elle en est la raison.
La mauvaise image de soi-même la met dans une quête effrénée de recherche d’amour, de valorisation et d’attention. Nous avons tous besoin d’amour, c’est un phénomène naturel, mais la personne dépendante en a besoin constamment et ne supporte que très difficilement le manque d’attention. Le plus souvent, pour éviter de recevoir des critiques négatives qui la vexent rapidement, elle aura tendance à calquer son comportement sur celui des autres afin de recevoir des compliments. Sa peur d’être rejetée l’enferme dans ce schéma relationnel.
Elle a du mal a contacter son insatisfaction et lorsqu’elle y arrive, elle est dans l’impossibilité de l’exprimer de peur de perdre l’amour de l’autre. La personne dépendante affectivement a du mal à s’opposer à un avis même si elle n’est pas d’accord avec, elle ne sait pas dire non.
Chemin thérapeutique :
Comme la dépendance affective est due à un mécanisme relationnel qui a été mis en place très jeune il est difficile de prédire à l’avance si la personne pourra s’en séparer complètement ou non. Ce qui est sûr c’est qu’un travail thérapeutique adéquat permettra de diminuer l’état de dépendance affective de manière à ne plus en souffrir. La personne, consciente de ses mécanismes, pourra alors adapter son comportement de manière à développer des relations affectives riches et épanouissantes pour elle.
La première étape passera par la reconnaissance de cette dépendance et de voir les avantages de changer de comportement, ce qui lui donnera la motivation pour faire le travail nécessaire pour devenir responsable de cette dépendance voir de s’en séparer complètement.
L’accompagnement de la personne en situation de dépendance affective devra passer par la reconstruction d’une image positive d’elle-même. La construction d’un amour propre de soi solide, en parallèle avec l’acceptation et la connaissance de soi représentent les fondements du travail à faire. Ainsi la personne peut commencer à adopter des comportements autonomes et responsables en fonction de ce dont elle a besoin pour son bon développement.
Cela se fera par la rencontre avec le thérapeute qui soutiendra la personne dans ses efforts de réhabilitation de la confiance en soi. C’est pour cela qu’en Gestalt thérapie, nous mettons l’accent du travail thérapeutique sur le lien et la relation dans le moment présent, moment privilégié pour travailler sur les comportements de la personne.
C’est au contact sincère et intègre du thérapeute, dans une relation accueillante et bienveillante que la personne prendra petit à petit conscience que ce qu’elle ressent et pense est légitime. Elle prendra alors conscience qu’elle n’a pas à calquer son comportement sur celui des autres pour être respectée et recevoir de l’amour.
Pour être respectée, elle devra apprendre aussi à se respecter elle-même et à se familiariser avec ses besoins personnels en approfondissant la connaissance de soi. En gestalt, ce travail passe par une conscience de soi, que nous appelons awareness, lié à nos ressentis corporels et physiques. En Gestalt thérapie, nous pensons que la connaissance et l’éclaircissement de nos besoins passent par cet état d’awareness.
La personne qui accompagne le dépendant affectif soutiendra aussi celui-ci dans l’expression claire de ses besoins. Il l’aidera à poser et clarifier ses limites, savoir dire non quand cela est nécessaire. La personne devra aussi apprendre à gérer ses frustrations et à en devenir responsable, car l’environnement ne peut pas tout lui apporter tout le temps.
C’est là que le travail sur les contraintes existentielles : la finitude, l’imperfection, la responsabilité, la solitude et la quête de sens, prendra toute sa valeur.
Ainsi la personne en situation de dépendance affective apprendra a se réguler et faire avec au mieux. Il est difficile de dire que la personne ne sera plus dépendante affectivement car comme partagé précédemment, nous sommes tous dépendant affectivement les uns des autres. Il n’y a donc pas de mal à être dépendant de l’autre et de l’environnement, le tout est de devenir responsable de cet état de fait, de faire avec et que cela ne nous pose pas de problème.
Il est normal d’avoir besoin de quelqu’un que cela soit pour se sentir aimé, pour aimer ou autres choses. Nous sommes tous interdépendant les uns des autres, c’est ce qui nous caractérise, les être humains. Faisons en sorte que cela soit pour le bien de tous !
Cet article n’est qu’une rapide ébauche concernant la dépendance affective. Il est le fruit d’un travail personnel et de formation qui s’appuie sur beaucoup de références de lecture et de partages d’expériences. Il m’est impossible de les citer toutes : écrivains, formateurs, collègues, amis …, tant elles sont nombreuses. Aussi je prends le parti de ne pas donner de bibliographie. Cet article n’est qu’un partage d’informations et d’idées dont l’origine ne m’est pas personnelle, je n’ai fait que mettre en forme à ma façon ce que j’ai appris et vous le partager. Cet article n’a donc vocation que de donner des pistes de réflexion et à rester sur ce blog. Il n’a pas plus de prétention que cela.
Rédigé par : Boris AUVILLE