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Préface de J'ai oublié de vivre (Luca) :

(paru en 2021 ECHOS Editions)

Le dévoilement est un exercice difficile. S’agit-il de tout dire ? De se « mettre à nu » complètement ? Quelle place pour l’imaginaire ? L’auteur de ce livre prend le parti de ne rien cacher du mal qui le ronge alors petit garçon et jeune ado. Un mal encore méconnu : l’anorexie.

Que ce cache-t-il derrière ce terme qui fait peur ?

Le lecteur est invité à comprendre à travers les lignes du passionné de foot. Luca parle vrai. Il livre un récit authentique, avec toute la franchise qui le caractérise. Qu’il est difficile pourtant de parler de ses blessures ! Blessures physiques, psychiques et morales, jusqu’à la réelle « fracture » familiale à l’apparition de la maladie. La maladie prend alors toute la place, elle n’épargne personne pas même les proches qui se retrouvent bientôt démunis. On aide du mieux qu’on peut…

L’adolescence est une période sensible, faite de fragilités. Les remarques acerbes peuvent venir « cogner » sur des jeunes qui hésitent et cherchent encore leur place. Luca raconte sa famille, son amour du sport, ses espoirs de carrières et d’amours adolescentes. Avec lui nous voyageons au cœur de l’Italie et faisons aussi la connaissance d’une grande famille où la convivialité des repas que l’on partage tous ensemble est une tradition. Si elle ne fait pas de bruit l’anorexie mentale s’installe pourtant petit à petit. Au début sans qu’il soit possible de la nommer puis le diagnostic ne laisse pas de doute possible. Le jeune garçon se lance dans une véritable ascèse qui mettra sa vie en jeu. L’anorexie tue, répétons-le.

De la lune de miel à l’enfer des troubles et le début d’une reconstruction qui sera longue, le lecteur peut suivre au fil des pages la dure bataille de Luca. Le récit est poignant et se fait sans concession envers les soins qui lui sont proposés. Encore trop de jeunes gens qui souffrent de troubles du comportement alimentaire « atterrissent » dans des services peu adaptés. On voit bien qu’on ne fait pas « plier » une personne anorexique, la prise en charge est faite de compromis et d’ajustements. Nous voyons aussi l’importance du lien et les réelles avancées grâce à la patience et aux encouragements de certains soignants. Les recommandations internationales vont dans le sens du maintien au maximum des personnes dans leur environnement afin notamment de ne pas déscolariser les jeunes. Les huit mois d’hospitalisation de Luca lui feront perdre une année. Heureusement, le jeune homme a des facilités… Serait-il précoce ?

Notons que la coupure avec les proches peut permettre d’atténuer les tensions familiales et laisser les fratries retrouver leur place. Il est vrai que l’anorexique fait peur et est trop souvent perçu comme une personne manipulatrice. L’anorexie est un combat ! Les relations avec la nourriture sont plus que douloureuses. Il faut comprendre la véritable terreur que représente le fait de manger pour la personne qui en souffre. Chaque bouchée pour reprendre du poids et gagner la bataille – qui ne s’arrête pas là comme le souligne l’auteur – est un coup de poignard dans l’âme.

Il me vient une image : l’anorexie est une armure. Une armure qui protège certes mais très vite elle détruit aussi. Luca a raison : l’anorexie c’est peut-être tout sauf un caprice.

Chaque parcours de guérison est unique et Luca trouve petit à petit le sien qui s’accompagne d’activité physique adaptée chez le kinésithérapeute. Son histoire continue de s’écrire aujourd’hui. Le « challenge » pour le jeune homme est de retrouver une relation toujours plus apaisée avec son corps et son image que la maladie a mis à mal. L’apprentissage de la douceur prend du temps mais il est désormais sur le chemin du rétablissement.

Ce livre s’inscrit dans un parcours de résilience teinté de courage. Il nous fait plonger au cœur de la souffrance tout en offrant des pistes pour mieux comprendre et ainsi mieux guérir. Je remercie Luca pour la générosité avec laquelle il s’est livré. Pour tout ce chemin accompli, pour la ténacité qu’il met à guérir et pour le message d’espoir. L’espoir est le carburant de la guérison.

Sabrina Palumbo - Coach, pair-aidante en santé mentale, auteur - Marraine des associations Solidarité Anorexie Boulimie

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